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Dossier : Le cinéma : entre menaces et liberté d’expression

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Voilà une nouvelle qui a fait beaucoup de bruit. Sony a annoncé mercredi dernier qu’il annulait les représentations de son film « The Interview » qui devait sortir aux Etats-Unis  pour Noël et en France le 11 février 2015, sous le nom de « L’interview qui tue ! ». La firme a suivi ainsi un mouvement amorcé par les grandes chaines de cinéma (Regal Entertainment, AMC Entertainment, Cinemark, Carmike Cinemas etCineplex Entertainment) qui ne souhaitaient pas programmer « The Interview ». Ceux-ci s’inquiétaient ainsi des menaces faites par « Guardians of peace », les mêmes qui avaient revendiqué le piratage de fin novembre de Sony,  qui profitaient de cette occasion pour faire un rappel sur les attentats du 11 septembre 2001, sous-entendant par la même que ce sinistre évènement pourrait se répéter. Sony n’a également donné aucune garantie quant à la diffusion du film sur les réseaux VOD et en DVD.

Pour rappel, « The Interview » est une comédie qui narre l’histoire d’un complot fictif de la CIA visant à assassiner le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un. Dès l’annonce de la production de ce film, le gouvernement nord-coréen s’était emporté en promettant que des représailles finiraient par arriver si le film aboutissait.



Aujourd’hui, le gouvernement américain poursuit l’enquête et a promis que les résultats seraient rendus publics.

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Les réseaux sociaux symbole de la liberté d’expression

En attendant, la décision de Sony a entrainé de nombreuses réactions sur les réseaux sociaux. En particulier à Hollywood, beaucoup de professionnels ont regretté cette annulation, estimant que la liberté d’expression en prenait un coup.

L’acteur Rob Lowe a lâché sur Twitter un « Wow tout le monde s’est couché. Les pirates ont gagné. Ils remportent une victoire éclatante.» De son côté, le réalisateur Judd Apatow (« 40 ans toujours puceau », « En cloque, mode d’emploi », « « Funny People », ami de Seth Rogen et de James Franco, acteurs principaux dans le film s’est exprimé par un «C’est honteux que les salles de cinéma ne projettent pas The Interview. Est-ce qu’ils vont retirer des écrans n’importe quel film qui reçoit une menace anonyme maintenant ?». Après l’annulation de la production du film «Pyongyang» dans la foulée de ces évènements, par le studio New Regency, Steve Carell qui devait en être l’acteur principal n’a pas hésité à faire part de sa consternation par un «triste jour pour la liberté d’expression».


Hollywood n’a pas toujours cédé.

Sur les réseaux sociaux, certains ne manqueront pas de faire un rappel concernant la réalisation du film « Le dictateur » en 1940 par Charlie Chaplin qui verra le jour malgré la pression du gouvernement allemand. Au vu du succès du film, on estime que celui-ci contribuera à la mobilisation nord-américaine qui jusqu’à alors ne s’intéressait guère à cette guerre qui concernait d’abord les européens. A travers son œuvre, celui que l’on surnommait Charlot s’en prenait ouvertement aux régimes dictatoriaux d’Hitler et de Mussolini, en n’hésitant pas à pasticher ces deux figures de l’histoire. Il en profitait également pour faire passer un message, le nazisme d’alors constituait non seulement une menace pour les juifs mais aussi de façon plus générale pour les démocraties. Ce drame social est aujourd’hui reconnu comme l’œuvre majeure de Charlie Chaplin.

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Si la sortie du film « Le dictateur » est restée dans les mémoires, il ne sera pas le seul à oser braver les pressions. Parmi ces films résistants, on pourrait citer « Le message » réalisé par Moustapha Akkad et sorti aux Etats-Unis en 1977, qui raconte les origines de l’Islam et l’histoire du prophète Mahomet, de la révélation à son pèlerinage d’adieu à la Mecque. Le 9 mars 1977, un groupuscule mené par Hamaas Abdul Khaalis prenait le contrôle du John A. Wilson Building et du Centre Islamique à Washington, puis abattait un policier et un journaliste avant de prendre en otage 149 personnes. Parmi ses revendications, celui-ci demandait à ce que « La révélation » ne soit pas distribué aux Etats-Unis, estimant qu’il portait atteinte à l’image de la religion musulmane. Finalement au bout de 39 heures, les preneurs d’otages finiront par être arrêté, et même si la projection sera interrompue à New-York un temps, le film sortira  quelques temps après.

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Autre film qui aura fait l’objet de menaces, « Dogma » sorti en 1999, avec Matt Damon et Ben Affleck en tête d’affiche. Réalisé par Kevin Smith, celui-ci raconte l’histoire de Loki et Bartleby, deux anges déchus, qui cherchent à retourner au Paradis. Mais si les deux renégats parviennent à leur fin, cela signe la fin de la vie sur Terre. La charmante Bethany est chargée par Metatron, la voix de Dieu, d’empêcher les deux lascars de réaliser leur projet en pénétrant dans une église consacrée du New Jersey. Pour la seconder, elle est accompagnée de deux incroyables prophètes, d’un prétendu treizième apôtre et d’une muse céleste. La réponse des ligues catholiques américaines ne tardera pas, certains n’hésitant pas à proférer des menaces de morts à l’encontre des frères Weinstein alors distributeurs de ce film par l’intermédiaire de Miramax. Si un pas en arrière sera fait un temps, un accord sera finalement trouvé avec Lions Gate Films et le film finira par sortir.

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Enfin, il serait difficile de ne pas parler de « Fahrenheit 9/11 », le film de Michael Moore, qui s’en prenait alors violemment à l’administration Bush, en pleine période électorale. Un temps devant être distribué par Miramax, Disney sentant le vent tourner, préfèrera décliner la distribution du film. Le salut viendra du festival de Cannes où le film reçu la palme d’Or. Grâce à cela, Michael Moore obtiendra le soutien d’IFC Films et de Lions Gate Films. Pourtant la partie était loin d’être encore gagnée, l’organisation Move America Forward publiant alors sur son site Web une page sous le nom de « Stop Michael Moore », listant les salles de cinéma qui comptaient participer à la diffusion du film. Celui-ci finira finalement par sortir en juillet 2004.

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Alors, « The Interview » finira-t-il par trouver un distributeur assez courageux pour oser le programmer dans les salles ? Ou bien la réponse viendra t’elle finalement d’internet et de la diffusion du film sur les réseaux ? Si l’avenir du film est aujourd’hui incertain et si la décision prise par Sony lui coûtera probablement très cher, les messages sur internet n’ont cessé depuis de proliférer, les internautes ne se privant pas au passage de ridiculiser Kim Jong-un. Internet pourrait donc bien être le réseau de la seconde chance pour « The Interview ».


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